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LE VERGER

queue, les cuisses et les flancs, et tournait vers Ado de grands yeux résignés où le soleil mourait.

— Ado, dit Monsieur Legendre, placez cette caisse à l’avant et pas trop au-dessus de l’essieu. C’est pour la cuisine.

Deux jambes trapues, bottées jusqu’au genou soutenaient son corps replet et, quand il parlait, la boucle nickelée de sa ceinture brillait sur sa panse.

— Avez-vous mon sac de voyage ? demandait Mimi Legendre, une blonde au verbe sec. Maman, où est mon sac de voyage ?

— On l’aura oublié dans le wagon.

Maurice gouaillait.

— On a oublié mon sac de voyage. Mon nécessaire de toilette…

— Le voici, Princesse ! Tenez, Ado.

— Faudrait bien franchir le bois avant que la noirceur prenne, disait Ado. Le portage est pas mal tirant cette année pour des gens de la ville.

Mimi, qui avait reçu l’ordre de monter à l’avant avec Ado, s’était assise sur le banc arrière avec sa mère. Pour la punir de sa petite rébellion, Monsieur Legendre prenait près d’elle le plus d’espace possible.

— Et tu es heureuse, disait-il, goguenard. Si Noël Angers était venu, c’est sur mes genoux que je t’aurais prise, Princesse.

— Monsieur Noël ne vient pas ? s’enquit Ado.

Ado se rappelait le garçon robuste qui, l’an dernier, entraînait Maurice à longueur de journée dans les lacis des sentiers.

— Il arrivera demain, reprit vivement Mimi.