Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

missionnaires de Péking, n’avaient, on le voit, pu donner aux Coréens qu’une idée bien vague du christianisme. Elle fut suffisante néanmoins, si l’on en croit les traditions coréennes, pour convertir un homme de bonne volonté. Cet homme nommé Hong Iou-han-i, ou Sa-riang-i, était né en 1736, d’une famille honorable dont les membres avaient souvent rempli des charges importantes. Il habitait Niei-san, et, dans sa jeunesse, avait pris des leçons de Ni Ik-i dont nous venons de parler. En 1770, il rencontra des livres chrétiens, les lut avec joie, abandonna toute autre étude, et se livra à la pratique de la religion. N’ayant ni calendrier ni livre de prières, et sachant seulement que les fêtes se succédaient de sept en sept jours, il se mit à chômer religieusement les 7, 14, 21 et 28 de chaque mois, laissant de côté, ces jours-là, toutes les affaires du siècle, pour se donner tout entier à l’oraison. Comme il ne connaissait pas les jours d’abstinence, il prit pour règle de se priver toujours des mets les plus délicats, donnant pour raison à ceux qui lui en faisaient la remarque que la cupidité naturelle est mauvaise de soi, et qu’il faut, autant que possible, la dompter. On raconte de lui plusieurs traits édifiants. Un jour qu’il voyageait à cheval dans un chemin boueux, il vit un vieillard chargé d’un lourd fardeau. Touché de compassion, il descendit de cheval, fit monter cet homme à sa place, et marchant à pied le conduisit lui-même. Une autre fois, ayant appris qu’un champ vendu par lui, venait de disparaître sous un éboulement de montagne, il en renvoya le prix à l’acquéreur, et malgré le refus de celui-ci, le força à l’accepter. On dit que Hong Iou-han-i passa treize ans dans les montagnes de Paik-san, pour se livrer sans obstacle, dans la solitude, à la contemplation et à la prière. Il mourut à Niei-san, n’ayant probablement jamais reçu d’autre baptême que le baptême de désir. On ne voit pas qu’il ait cherché à convertir personne, et à sa mort, il ne laissa point de disciples.