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plus haut, racheté par sa femme quelques jours après l’exécution. Ils arrangèrent ces corps en ordre, un à un, chaque tête près du tronc, et les mettant provisoirement à l’abri des animaux, ils s’en retournèrent, car il allait faire jour. Le surlendemain ils revinrent, apportant sept cercueils, des linges, de l’eau bénite, et le livre des prières pour les morts. Ils creusèrent trois fosses très-spacieuses, formant entre elles un triangle. Dans la fosse la plus large, au sommet de ce triangle, ils placèrent d’abord le cercueil de Mgr Berneux, puis à sa droite et un peu plus bas celui de M. de Bretenières, et sur une même ligne avec celui-ci, à gauche de l’évêque, le cercueil d’Alexis Ou. Dans la fosse de droite, ils déposèrent MM. Pourthié et Petitnicolas, et dans celle de gauche MM. Beaulieu et Dorie. Il paraît que la tête de M. Dorie a été changée avec celle de M. Petitnicolas ; les chrétiens qui présidaient à la reconnaissance des corps, n’ayant vu ni l’un ni l’autre de ces missionnaires de leur vivant, ont pu facilement commettre cette erreur. Près de chaque cercueil, on a mis dans des cendres, une petite écuelle renversée, au fond de laquelle est écrit le nom. C’est là, à une demi-lieue au sud de la capitale, sur la montagne appelée Ouai-a-ko-kai, que reposent les corps des martyrs, en attendant le jour de la résurrection glorieuse.


En quelques jours, six missionnaires avaient été mis à mort, mais la rage des persécuteurs n’était pas satisfaite ; ils voulaient en finir de suite avec les prêtres européens. Par les dénonciations de Ni Son-i, ils avaient appris qu’il y en avait au moins neuf en Corée, et le traître leur ayant fourni des indications sur les lieux où ils séjournaient habituellement, des satellites de la capitale avaient été envoyés dans ces diverses directions. Le jour même où MM. Pourthié et Petitnicolas étaient exécutés à Sai-nam-to, Mgr Daveluy fut arrêté à son tour. En quittant la capitale, où il avait été inutilement appelé par le régent, Mgr Daveluy était revenu dans le Nai-po, continuer la visite des chrétientés. Il y était encore occupé, quand un billet de M. de Bretenières lui apprit l’arrestation du vicaire apostolique. Tout d’abord, il ne put croire à une persécution violente, et pensa que le gouvernement tenait à avoir sous la main les évêques et les missionnaires pour mieux se tirer des complications politiques avec les Russes, ou dans quelqu’autre but non encore expliqué. Aussi, voyant que les satellites lancés à la poursuite des Européens commettaient des violences abominables, pillant, frappant, torturant les chré-