Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/316

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

timents communs à tous. Mais Dieu étant le premier père de tous les hommes est le souverain maître de toutes choses, dussé-je mourir, je ne le renierai pas. — Il n’y a rien à faire avec cet être-là, » dit le mandarin, et il le fit battre cruellement, puis l’envoya à la préfecture de Hai-mi.

Devant ce nouveau tribunal, aux mêmes accusations ridicules du juge, Laurent fit les mêmes réponses ; aux tortures de tout genre, il continua d’opposer une patience inflexible. — « Quel est ce Dieu dont tu parles, disait le mandarin, où est-il ? que fait-il ? Peux-tu le connaître, toi, quand nos savants l’ignorent ? Si cette doctrine était vraie, le roi, la cour et ses mandarins ne la suivraient-ils pas ? — Dieu est au ciel, d’où il fait connaître ses ordres ; si vous les exécutez, il vous fera monter près de lui ; si vous lui résistez, il vous précipitera dans les enfers. C’est une peine un million de fois plus forte qu’on ne peut l’imaginer ici-bas. Aucun être n’est en dehors de ses bienfaits ; mais puisqu’une pauvre créature telle que moi en a reçu plus que tous mes supérieurs, dussé-je mourir, je ne le renierai pas. — Après ton supplice, la mère aussi sera mise à mort à cause de toi. — Après ma mort, ma mère restera entre vos mains, mais elle aussi a été créée par Dieu, Dieu pensera à elle. — Est-ce par crainte de l’enfer que tu agis ainsi ? — Oui, c’est par crainte de l’enfer ; mais, en tous cas, je ne puis renoncer à mon Dieu. » Le juge le fit battre de quinze coups de la grosse planche, puis reconduire en prison.

À l’interrogatoire suivant, Laurent développa avec plus d’énergie la doctrine chrétienne sur le ciel et sur l’enfer. « Puisque vous voulez aujourd’hui même me mettre à mort et que vous traitez ma religion de vaine superstition, je ne puis me taire. Sachez-le donc : à la fin du monde, après l’anéantissement de tous les royaumes, tous les hommes de tous les âges, grands et petits, rois et peuples, seront réunis devant le Fils de Dieu, descendu du ciel et porté sur les nues, et il jugera les hommes des temps passés et présents. Les bons seront portés au ciel avec le Seigneur Jésus et ses saints, et jouiront d’un bonheur dix millions de fois plus grand que toutes les gloires et tous les plaisirs du monde. Les méchants seront engloutis dans l’enfer, par la terre qui s’ouvrira sous leurs pieds, et souffriront des peines dix millions de fois plus fortes que les douleurs de ce monde, plongés dans un feu ardent qui ne s’éteindra jamais. À ce moment-là, tout regret sera tardif et inutile ; chacun recevra selon ses œuvres. Puisque vous voulez me faire mourir, retournez maintenant mon corps, et, me frappant sur la gorge, tuez-moi tout de suite. — Tu mour-