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année un tribut de trente peaux humaines. Après quelques années, cet impôt barbare fut changé en une redevance annuelle d’argent, de riz, de toiles, de gen-seng, etc., etc. En outre, les Japonais gardèrent la propriété du port de Fousan-kaï, sur la côte sud-est de la Corée, et ils en sont encore aujourd’hui les maîtres. Ce point important est occupé par une colonie de trois ou quatre cents soldats et ouvriers, qui n’ont aucune relation avec l’intérieur du pays, et ne peuvent faire de commerce avec les Coréens qu’une ou deux fois par mois, pendant quelques heures. Fousan-kaï est sous l’autorité du prince de Tsou-tsima[1]. Jusqu’en 1790, le roi de Corée était obligé d’envoyer une ambassade extraordinaire au Japon pour notifier son avènement, et une autre tous les dix ans pour payer le tribut. Depuis cette époque, les ambassades ne vont qu’à Tsou-tsima, ce qui demande beaucoup moins de pompe et de dépenses.

En 1636, quand la dynastie mandchoue qui règne actuellement en Chine renversa les Ming, le roi de Corée prit parti pour ces derniers. Son pays fut aussitôt envahi par les Mandchoux, et il ne put opposer de résistance sérieuse à l’ennemi qui vint lui dicter des lois dans sa propre capitale. Il y a encore aujourd’hui, près d’une des portes de Han-iang (Séoul), un temple

  1. La possession de Fousan-kaï par les Japonais est un témoignage permanent de la défaite des Coréens, et leur orgueil national en est vivement blessé. Aussi, leurs histoires ont-elles grand soin de passer sous silence les faits dont nous venons de parler et de les remplacer par des légendes ridicules. Voici, par exemple, comment les notes explicatives d’une carte coréenne rendent compte de la présence des étrangers sur le sol de la Corée.

    « Séjour des barbares, habitants de Taïma-to, à Tsieu-lieng (petite île à deux ou trois lieues sud-est de Fousan-kai).

    « Lorsque Siei-tsong-tsio régnait, plusieurs barbares de Taïma-to quittèrent cette île et vinrent s’établir sur les côtes de Corée, dans trois petits ports, appelés ports de Pou-san, d’Ieum et de Tsiei, et ils ne tardèrent pas à y devenir nombreux. Il y avait cinq ans que Tsou-tsong était roi, lorsque les barbares de Pou-san et d’Ieum excitèrent des troubles, et pendant une nuit ils détruisirent les murailles de la ville de Pou-san dont ils tuèrent aussi le mandarin Ni Ou-tsa. Battus par les troupes de l’État, ils ne purent continuer à vivre dans ces ports, et se retirèrent dans l’intérieur du pays. Cependant, peu après, ayant demandé pardon de leur faute, ils obtinrent de venir s’y établir de nouveau. Ce ne fut que pour quelque temps, car, un peu avant l’année im-tsin (1592), ils retournèrent tous à Taïma-to leur patrie. En l’année keï-haï (1599), le roi Sieun-tsio eut des communications avec les barbares de Taïma-to. Il arriva qu’il les appela aux lieux qu’ils avaient quittés sur les côtes de Corée, leur bâtit des maisons, les traita avec bienveillance, établit à cause d’eux un marché qui avait lieu chaque cinq jours à partir du troisième jour de chaque mois, et même quand ils avaient une plus grande quantité de marchandises, il permettait de tenir les marchés plus souvent encore. »