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talent et courage l’apologie des principaux articles de notre sainte religion, devant les différents tribunaux. La plupart périrent misérablement dans les prisons, au milieu des horreurs de la faim, ce qui se conçoit facilement quand on connaît le régime des prisons de ces pays. Certaines rations sont, il est vrai, assignées par la préfecture à ceux des prisonniers qui n’ont aucune ressource ; mais elles passent par beaucoup de mains ; chacun en soustrait quelque partie à son gré, et ce qui parvient au pauvre patient se réduit à quelques grains de riz insuffisants pour soutenir son existence. À plus forte raison, pendant une famine aussi épouvantable et aussi générale que celle de 1815, les employés subalternes, satellites, prétoriens, geôliers, fustigateurs et autres, durent-ils voler à peu près tous les vivres donnés pour les chrétiens, et cela en toute impunité, car les chrétiens étaient regardés par les idolâtres comme des êtres dégradés et indignes de faire partie de la race humaine.

Beaucoup de néophytes, pris dans la province de T’siong-t’sieng, furent renvoyés pour être définitivement jugés et punis dans leur propre préfecture ou province. Des témoins de l’époque assurent qu’une vingtaine, au moins, de ces infortunés, après s’être traînés péniblement sur les chemins pendant quelques jours, périrent de faim ou des suites de leurs blessures, les uns sur le bord des routes où les conducteurs les abandonnaient, les autres dans les auberges où le défaut d’argent ne leur permettait pas de se rien procurer. Enfin, grand nombre d’autres cédant à la tentation, rachetèrent leur vie par une honteuse défection. Ces apostats furent ou relâchés purement et simplement, ou envoyés en exil dans les diverses provinces du royaume ; en sorte que, vers le milieu de l’été, il ne restait que peu de confesseurs dans les prisons de Tai-kou.

Outre ceux dont nous avons déjà parlé, nous pouvons encore citer An T’siem-tsi, quelquefois nommé Tsi-riong-i, natif du district de Po-eun. Ayant été condamné à mort avec les autres, il mourut en prison, de faim ou de la peste, avant d’avoir pu subir sa sentence. Il était âgé d’environ cinquante ans.

Ni Ioun-tsip-i, de Ken-sa-ma-kol, n’étant encore que catéchumène, fut pris à Ou-lien-pat avec André Kim, et sans avoir apostasié, mourut, dit-on, de faim et d’épuisement.

Dans ces mêmes prisons de Tai-kou, d’autres encore gagnèrent le ciel par le même genre de martyre, mais leurs noms, oubliés des hommes, ne sont plus connus que de Dieu.


À Ouen-tsiou, capitale de la province de Kang-ouen, celui qui