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au-dessus des soupçons, et sa position officielle lui donnait assez d’influence pour couvrir les démarches des autres. Dès l’année qui suivit sa conversion, c’est-à-dire en 1824, Augustin fit en effet le voyage de Pékin, en qualité d’interprète de l’ambassade. Arrivé en cette ville, il se rendit avec Paul Tieng auprès de l’évêque et des prêtres, demanda et reçut le baptême, puis, mettant sous leurs yeux le triste état des fidèles de Corée, semblables à des brebis délaissées, en proie à la fureur des loups, il les conjura de pourvoir à leur salut par tous les moyens possibles. Son zèle éclairé ne se borna pas là ; il pensa, et avec raison, qu’une supplique adressée directement au Souverain Pontife, au nom de tous les chrétiens, ses frères, pourrait hâter la réalisation de leurs communs désirs, et il écrivit, cette année-là même, suivant les uns, ou plus probablement une des années suivantes, une lettre au Pape, dans laquelle lui dépeignant la misérable situation de la chrétienté, il le conjurait de leur tendre la main, et de les tirer de l’abîme.

Nous verrons plus tard que cette lettre eut son effet. De son côté l’Évêque de Péking touché des efforts constants de ces pauvres orphelins, promit de leur accorder enfin un prêtre, l’année suivante. C’était au cinquième voyage de Paul Tieng. Les arrangements furent pris, et on fixa l’époque du rendez-vous à Pien-men, ville frontière de la Chine. Les Chrétiens accueillirent cette promesse avec une joie indicible. Tous les préparatifs se firent avec empressement, et, au temps convenu, on se rendit à Pien-men pour recevoir et introduire l’envoyé du Seigneur. Mais une nouvelle épreuve devait désoler la patience de nos pauvres néophytes. Arrivés au lieu fixé, les courriers ne rencontrèrent pas le prêtre : personne n’y était venu. Comment décrire leur désappointement et leur tristesse ? Paul Tieng, qui était à leur tête, ne pouvant deviner la cause de ce contre-temps, poursuivit la route jusqu’à Péking, et vit que les déplorables circonstances dans lesquelles la chrétienté de Chine se trouvait elle-même à cette époque, avaient mis l’évêque dans l’impossibilité absolue de tenir sa promesse.

Paul ne se découragea point cependant, et de concert avec Augustin Niou, il travailla à faciliter de plus en plus les communications annuelles, et à multiplier pour l’avenir les chances de réussite. Leur projet était de s’associer quelque homme sûr et dévoué parmi les valets habitués de l’ambassade ; mais malheureusement aucun d’eux n’était chrétien. Après mûre réflexion ils jetèrent les yeux sur Charles Tsio, alors païen, qu’ils avaient