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tiens fidèles fut la mort édifiante de Pierre Ni Ho-ieng-i que nous avons vu confesser courageusement sa foi en 1836. Déposé à la prison après sa condamnation à mort, il continuait à purifier son âme par les souffrances inséparables de sa pénible position. Il ne paraît pas qu’il ait eu d’autres tortures à endurer : mais, outre le supplice de pourrir dans ces cachots infects, on sait combien de privations et d’avanies y subissent habituellement les prisonniers, surtout quand, par leur titre de chrétiens, ils sont placés au-dessous des voleurs et des assassins. Pierre ne se laissa pas abattre : à défaut de consolations extérieures, il avait celles de la grâce divine. Comme saint Paul, il savait à qui il avait cru, scio cui credidi, et non content de supporter avec résignation les souffrances et les maladies, il jeûnait presque continuellement. Sa droiture, sa douceur, son affabilité lui avaient concilié le cœur des geôliers ; et il parvint par ses constantes exhortations à convertir et à préparer au baptême un des vieux prisonniers enfermés avec lui. Il se consolait aussi avec sa sœur Agathe, toujours ferme et inébranlable, et ils se promettaient d’être martyrs le même jour. Mais à la fin, ses forces étant complètement épuisées, il comprit que la mort approchait. « J’avais toujours désiré, disait-il en soupirant, mourir sous le glaive, mais tout arrive par l’ordre de Dieu ; que sa volonté soit faite ! » Après quatre ans de prison, il rendit paisiblement son âme à son Créateur, le 8 de la dixième lune de mon-sioul (1838), à l’âge de trente-six ans.

Vers la fin de l’année, Mgr Imbert alla à Sou-ri-san, à cinquante lys (cinq lieues) de la capitale, pour célébrer les fêtes de Noël avec les chrétiens et leur administrer les sacrements. Ce jour-là même, on ne sait pourquoi, les satellites envahirent brusquement la demeure d’une famille chrétienne de ce village, à quelques pas de la cachette de l’évêque, en fouillèrent tous les coins et recoins, s’emparèrent de quelques livres de religion, et firent prisonniers les gens de la maison pour les livrer au mandarin. Heureusement, un païen du voisinage, ami de cette famille, accourut au bruit, entra en composition avec les satellites et fit relâcher les chrétiens, au prix d’une rançon d’environ cent francs. Les livres et objets de religion saisis furent brûlés d’un commun consentement, et les gens du mandarin se retirèrent sans se douter de l’importante capture qu’ils venaient de manquer.

Malgré toutes les difficultés que le démon ne cessait ainsi de leur susciter, l’évêque et ses confrères travaillaient avec courage et persévérance. Du 20 décembre 1838 jusqu’au 30 janvier suivant, Mgr Imbert visita les chrétientés de la campagne les plus