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En 1849, la mission de Mandchourie eut à craindre une persécution sanglante. Un certain nombre de chrétiens furent emprisonnés, chargés de chaînes, et mis à la question ; la plupart confessèrent généreusement leur loi. M. Berneux, qui, depuis quelque temps, était provicaire de la mission, courut à Moukden, capitale du Léao-tong, pour réclamer justice auprès du mandarin supérieur, puis rejoignit Mgr Verrolles. Leur position était très-critique : plusieurs mandats d’arrêt étaient lancés spécialement contre eux, et, pour les saisir, des satellites en grand nombre sillonnaient en tous sens les chrétientés. Ils prirent le parti de céder quelque temps à l’orage, et se jetèrent dans une barque chrétienne qui les conduisit à Chang-haï. M. de Montigny, consul de France, leur prêta l’appui le plus bienveillant, et fit parvenir à Moukden une lettre menaçante, où il réclamait l’observation exacte des édits impériaux concernant les chrétiens.

De Chang-haï, Mgr Verrolles partit pour l’Europe où l’appelaient les affaires de sa mission. Il avait été décidé d’abord que M. Berneux l’accompagnerait ; les circonstances ayant changé, M. Berneux reprit le chemin de la Mandchourie. Il eût été heureux sans doute de revoir sa famille, mais il n’était pas homme à perdre du temps et de l’argent dans un pareil voyage, sans une nécessité absolue. « Vivons maintenant de privations et de sacrifices, » écrivait-il alors à sa mère, « viendra le jour de la rémunération, où, pour ne plus jamais nous séparer, nous serons réunis dans le sein de Notre-Seigneur. » Plus tard, après la mort de sa mère, il disait à sa sœur : « Chère sœur, tu souhaites ardemment de me revoir, mon éloignement est pour toi une occasion de t’affliger. Supporte-le avec patience, et offre cette peine à Dieu. Tu te résignerais plus facilement, si tu pouvais comprendre combien peut être utile un missionnaire, dans ces régions où tant d’âmes se perdent faute de prêtres. C’est maintenant que je puis espérer travailler avec fruit au salut de ces peuples, dont je commence à connaître la langue et les usages, et dont j’ai la confiance. Retourner en France à présent, ce serait avoir inutilement couru bien des dangers, et enduré bien des fatigues ; ce serait me rendre responsable devant Dieu de tout le bien que sa grâce peut opérer par mon ministère, et que mon retour empêcherait. »

En 1853, M. Berneux fut attaqué d’une fièvre typhoïde très-grave qui mit, pendant quelque temps, sa vie en danger. Il était à peine remis de cet assaut, et commençait à reprendre son travail habituel lorsqu’au mois de septembre, il fut pris du choléra.