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Plower qui portait le pavillon de l’amiral : c’était le signal attendu. Aussitôt, les tentes qui cachaient les vingt batteries des forts se replient, et une horrible grêle de boulets tombe sur les canonnières les plus avancées qui répondent bravement, mais sans pouvoir causer à l’ennemi de pertes sérieuses. Bientôt la position ne fut plus tenable, trois canonnières coulaient, l’amiral avait reçu deux blessures ; il ordonna de débarquer les troupes afin de marcher à l’ennemi, et par un assaut vigoureux, de le déloger de ses positions. Mais la rive du fleuve à cet endroit est un terrain fangeux où les hommes enfonçaient jusqu’aux genoux ; de plus, les Chinois y avaient creusé de larges fossés remplis de l’eau du fleuve, qu’il fallait passer à la nage, en sorte que les munitions furent bien vite avariées et qu’il ne resta plus aux soldats d’autre arme que la baïonnette. Mais comment s’élancer à la baïonnette à travers un marais d’où l’on avait peine à se tirer ? À neuf heures du soir, on avait perdu quatre cent quatre-vingts hommes tués ou blessés, les canonniers avaient épuisé leurs munitions, et les troupes se rembarquèrent à la hâte. Les ambassadeurs ne pouvant soutenir une lutte aussi inégale, avec des forces qui n’avaient été calculées que pour leur servir d’escorte, se retirèrent, et rentrèrent à Chang-haï le 9 juillet.

Le gouvernement chinois fut enivré de ce triomphe inattendu sur les diables d’Occident : mais pendant qu’il chantait victoire et menaçait les comptoirs européens de Chang-haï, de Canton, etc. et même l’île de Hong-kong, la France et l’Angleterre préparaient le châtiment de son odieuse perfidie.

L’année suivante, à la fin de juillet, les deux ambassadeurs, le baron Gros et lord Elgin, étaient dans le golfe de Pé-tché-ly, avec une flotte considérable qui portait les corps expéditionnaires français et anglais, et quelques jours après, la petite armée alliée entrait en campagne. Les Chinois attendaient à l’embouchure du Peï-ho ; on les y laissa, et l’on alla débarquer à Peh-tang, trois lieues plus haut. Le 14 août, on enleva sans difficulté sérieuse, un camp retranché de troupes tartares, et le 21, le principal fort de Takou fut emporté d’assaut, après un bombardement de cinq heures. Les alliés eurent quatre cents hommes hors de combat, tués ou blessés. C’était beaucoup, vu leur petit nombre, mais il s’agissait d’une position que les Chinois travaillaient depuis deux ans à rendre imprenable, et qui était défendue par l’élite des troupes tartares. Ce succès eut un effet prodigieux, et l’on crut un instant pouvoir considérer la guerre comme finie.