Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/476

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graves ne cessaient de s’élever entre les individus des deux nations, les meurtres s’y multipliaient, et le pouvoir central ne pouvait ni les empêcher ni les punir ; ce que voyant, le gouvernement coréen, vers la fin du dernier siècle, fit évacuer cette province et défendit à ses sujets d’y habiter. Depuis lors, les aventuriers chinois s’y sont établis en toute liberté ; une foule de voleurs et d’assassins coréens, fuyant les tribunaux et les mandarins, les y ont rejoints, et tous ensemble forment des bandes absolument indépendantes et presque sauvages. Le mandarin en question indique deux ou trois montagnes où il faudrait à tout prix élever des forteresses, pour barrer le passage à ces maraudeurs qui, à la première occasion, pourront mettre les provinces septentrionales de la Corée à feu et à sang.

Enfin il arrive au danger suprême, à celui qui était la grande préoccupation de tous les esprits, l’invasion des Européens. Il dépeint en termes très-énergiques les malheurs qu’ils apportent avec eux partout où ils se présentent : ruine des royaumes, destruction des plus florissantes cités, dépravation des mœurs, établissement d’une religion abominable et de coutumes perverses, etc… « Mais, » ajoute-t-il, « ils ne sont redoutables que sur mer. Leurs fusils sont, il est vrai, plus gros que les nôtres, mais ils n’ont pas même un arc dans toutes leurs armées. Comment tiendront-ils devant nos archers ? Ils peuvent avoir vaincu quelquefois dans les pays de plaine, où rien ne s’opposait à leurs évolutions ; mais, dans notre pays montagneux, si nous avons soin d’organiser des soldats et de bâtir quelques forts sur les chemins qui conduisent à la capitale, nous les repousserons facilement. Fortifions au midi Tong-nai (chef-lieu du district le plus voisin du poste japonais) ; à l’ouest, Nam-iang, Pou-pieng et In-tsiou, où ils se sont déjà montrés il y a quelques années. Élevons une citadelle sur la montagne qui domine l’île de Kang-hoa, placée en travers du fleuve, et si près de la capitale. Leurs vaisseaux sont trop grands pour remonter facilement le fleuve. Autrefois, ils n’avaient que deux ou trois navires. Il paraît qu’ils en ont maintenant au moins dix, mais quelques milliers d’hommes ne peuvent pas sérieusement nous mettre en péril. » En terminant, l’auteur fait remarquer que, la religion d’Europe étant très-répandue dans les provinces méridionales, il importe de prendre toutes les mesures indiquées à l’insu des prêtres étrangers, afin qu’ils ne puissent pas les faire connaître à leurs compatriotes.

Ce plan fut accueilli par les ministres et le public avec une faveur marquée. Le mandarin qui l’avait rédigé obtint immédia-