Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/478

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chrétiens, et hâté le jour où il tombera pour jamais. Dieu ne l’a pas voulu ! Les navires qui, de la pointe du Chan-tong où ils séjournèrent des mois entiers, n’étaient pas à quarante lieues des côtes de Corée, partirent sans y faire même une courte apparition.

Quand on fut certain du départ de la flotte anglo-française, la panique générale se calma peu à peu, et le gouvernement, revenu de sa frayeur, songea à faire quelques préparatifs de défense pour le cas où les barbares d’Occident seraient tentés de revenir. M. Pourthié écrivait à cette époque : « Ordre secret a été donné aux mandarins de revoir leurs arsenaux militaires et de compléter les rôles de conscription. Or, ces arsenaux sont, en beaucoup d’endroits, tout à fait vides ; il faut recourir à l’histoire ancienne pour savoir qu’il y a eu jadis, dans ces maisons, des armes appartenant à l’État ; ou bien, s’il en reste quelque peu, ce sont la plupart des tronçons, des morceaux de fer informes, des pièces couvertes de rouille, le tout inserviable. Presque tous les mandarins ont, peu à peu, vendu, laissé vendre ou égarer ces armes. Cependant, le gouvernement ordonne de tout mettre sur un pied respectable, mais il se garde bien d’assigner des fonds pour couvrir ces dépenses. Dans notre pays, en pareil cas, un fonctionnaire public serait embarrassé et demanderait des fonds ; mais il ne faut pas dire au gouvernement coréen qu’on n’a pas d’argent, ou que tel arsenal est vide ; de pareilles excuses seraient fort mal reçues. Nos mandarins, stylés aux roueries du système administratif de ce pays, s’en tirent sans difficulté. Ils font simplement appeler les plus riches de leurs administrés, dans la classe du peuple, et leur enjoignent de verser une certaine somme, s’ils ne veulent être maltraités ; ceux-ci s’exécutent presque toujours, parce qu’un refus leur attirerait certainement de cruels supplices et peut-être la mort. C’est par de tels moyens que bon nombre de mandarins viennent, en ce moment, à bout de se procurer des lances, des fléaux en fer, des arcs et de mauvais fusils à mèches.

« Vous allez me demander si ce sont là toutes leurs armes ? Ils ont encore en différents endroits quelques canons plus petits que nos petites pièces de campagne ; d’autres canons plus forts sont entassés, dit-on, dans une maison près des murs de la capitale. Ils ont même des bombes qu’ils appellent Poullang-kui, terme dont la traduction littérale est pièce française ; peut-être est-ce parce qu’ils auront pris quelque bombe des navires échoués du commandant Lapierre, et en auront fabriqué sur ce modèle.