Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/112

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qu’un comme on le trompe il trouve bientôt le moien de ne plus être trompé.

Il s’en faut bien au reſte que tous nos valets de la Comédie ſoient des fripons. Leur bon ſens, leur probité contraſte ſouvent aſſés bien, avec la folie ou les vices de leurs Maîtres. Dans le feſtin de Pierre, le Joueur, le Menteur, l’Ingrat, le Méchant, le Diſtrait. Les valets ſont d’honnêtes gens, ils ne ſont que comiques & ſubordonnés à l’intrigue de ces Piéces. Nos Auteurs ne les font donc pas toujours dignes de la corde ; ils les font tels que le ſujet l’exige : J’entens ceux de nos Auteurs qui ſçavent faire des valets : M. Deſtouches eſt mort & je crains bien que, pour vôtre ſatisfaction, l’art de bien faire parler des valets ne ſoit dans la tombe avec lui.

Après avoir Juſtifié Le Bourgeois Gentil homme, Georges Dandin, L’Avare & nos Valets, vous jugez bien qu’il me ſera facile de juſtifier le Miſantrope : que je vous ſuis obligé M. de ne pas me donner d’ouvrage plus difficile à faire.

Moliére & c’eſt toujours là vôtre opinion n’a pas voulu joüer les vices, il n’a joué que les ridicules. Mais M. les ridicules ne ſeroient pas ſans les vices : ce ſont eux qui en ſont les ſources, on ne peut donc pas attaquer un ridicule ſans attaquer le vice qui l’a fait naître. Celui des Prétieuſes, par exemple, a pour principe l’orgueil qui fait gémir Cathos & Madelon de n’être pas nées de Cyrus ou d’Ar-