Page:Dante - L’Enfer, t. 1, trad. Rivarol, 1867.djvu/24

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la fois son exil et la perte de tous ses biens.

Dans son malheur, il s’attacha aux Gibelins ; et comme en ce moment Henri de Luxembourg était venu se faire couronner à Rome, ce parti avait repris vigueur, et l’Italie était dans l’attente de quelque grande révolution : si bien que Dante conçut le projet de se faire ouvrir par les armes les portes de Florence. Aussi coupable et moins heureux que Coriolan, il courait de l’armée des mécontents aux camps de l’empereur, passant sa vie à faire des tentatives infructueuses et témoin de toutes les humiliations des impériaux.

C’est avec aussi peu de succès qu’il eut recours aux supplications, comme on le voit par une lettre au peuple de Florence, qui commence par ces mots : Popule mee, quid feci tibi ? Renonçant enfin à tout espoir de retour, il se mit à voyager, parcourut l’Allemagne et vint à Paris, où, comme on l’a dit de Tasse, on assure qu’il travaillait à ses poëmes. Forcé dans la suite d’implorer la protection des princes d’Italie, il vécut dans différentes cours et mourut en 1321, âgé de cinquante-six ans, chez Gui de Polente, prince de Ravenne.

Dante, à la fois guerrier, négociateur et poëte, eut sans doute des succès et quelques beaux moments ; mais pour avoir passé la moitié de sa vie dans l’exil et l’in-