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CHANT I.

Je pleurais, reculant vers cette forêt sombre
Où me poussait la louve. Or j’aperçus dans l’ombre
Un homme qui semblait muet depuis long-temps ;
Et recueillant alors tous mes esprits flottans :
Qui que tu sois, criai-je, ombre ou vivant, n’importe,
Miserere !… Mais lui me parla de la sorte :

« J’ai quitté les vivans, jadis je fus l’un d’eux,
Et mon père et ma mère étaient Lombards tous deux,
Car Mantoue est le nom dont leur pays se nomme :
Or je naquis sous Jule, et je vécus dans Rome,
Sous l’empereur Auguste, au temps des dieux menteurs,
Et je fus un poète, et je touchai les cœurs
En chantant ce guerrier qui s’en revint de Troie,
Quand sa pauvre Ilion du feu grec fut la proie.