Page:Dante - La Divine Comédie, trad. Lamennais, 1910.djvu/326

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noces par l’instigation d’autrui [1] ! Beaucoup seraient joyeux qui sont tristes, si à Ema [2] Dieu t’avait donné [3] la première fois que tu vins à la ville : mais à cette pierre mutilée qui garde le pont [4], Florence au terme de sa paix devait une victime.

« Avec ces gens et avec d’autres encore, j’ai vu Florence dans un tel repos, qu’elle n’avait point sujet de pleurer : avec ces gens, j’ai vu le peuple si juste et si glorieux, que jamais à la hampe le lis n’était placé à rebours [5], ni par la division fait vermeil [6]. »


CHANT DIX-SEPTIÈME


Tel que vint à Climènes, pour s’éclaircir de ce qu’il avait entendu contre soi [7], celui qui encore rend les pères peu faciles aux prières de leurs fils [8] ; tel étais-je, et tel paraissais-je

  1. Ce fut, dit-on, la mère de la jeune Donati qui poussa Buondelmonte a violer la parole qui le liait aux Amideï.
  2. Fleuve qu’on passe en venant à Florence de Montebuono, bourg où Buondelmonte avait ses possessions, et où peut-être il était né.
  3. « Si tu t’étais noyé dans l’Ema. »
  4. La base de l’ancienne statue de Mars, à l’entrée du Ponte-Vecchio, près de laquelle fut tué Buondelmonte.
  5. C’est-à-dire que Florence n’était jamais vaincue dans ses guerres. Elle avait un lis pour armoiries, et, comme après une défaite l’usage est que le vainqueur renverse les enseignes conquises, le lis n’était jamais placé à rebours.
  6. Les armoiries de la Commune, dans l’étendard du peuple, étaient un lis blanc en champ rouge ; mais le parti guelfe ayant prévalu, il y substitua un lis rouge en champ blanc.
  7. Menacé de malheurs futurs par de vagues prédictions, Dante attend de Cacciaguida les éclaircissements qu’il lui a demandés à ce sujet, et il compare son anxiété à celle de Phaéton allant trouver sa mère Climènes pour savoir d’elle s’il était véritablement fils d’Apollon, ce qu’Épaphos lui avait nié.
  8. L’exemple de Phaéton foudroyé pour avoir mal guidé le char du Soleil, que son père Apollon, cédant à ses prières, lui avait permis de conduire, fait encore que difficilement les pères accordent à leurs fils ce que ceux-ci leur demandent.