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INTRODUCTION.

quelle est donc la vraie théorie sociale ? et en est-il une ? Oui, sans doute, puisque l’homme a des lois. Mais, au lieu de la chercher dans ces lois, on n’a guère fait qu’ériger en doctrine leur violation même.

Observons d’abord que les deux systèmes dont nous venons de montrer la fausseté dangereuse reposent sur un principe commun. Supposant possible et nécessaire la possession de la vérité absolue, pour le salut de l’âme, et l’action permanente, par voie de commandement, de la justice absolue pour le salut du corps ou de la société extérieure, l’organe du juste et l’organe du vrai dans l’humanité doivent, dès lors, être élevés au-dessus de l’humanité même, laquelle n’admet rien d’absolu. Le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel sont donc forcément conçus comme de purs instruments passifs, au moyen desquels Dieu gouverne immédiatement le genre humain. Or, quoi que suppose la théorie, ces pouvoirs sont, de fait, des hommes semblables aux autres hommes, doués comme eux d’une activité, d’une volonté propre, sujets aux mêmes erreurs, aux mêmes passions. D’où il suit, d’une part, qu’en tant qu’organes de Dieu, vérité infinie, justice infinie, une obéissance infinie aussi leur est due ; et que, d’une autre part, cette obéissance dans l’ordre de la pensée et dans l’ordre de l’action, devient l’obéissance à tout ce qu’ordonnent, en tant qu’hommes, ces organes supposés de Dieu. Car, si