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INTRODUCTION.

sa superbe, il n’a que cela. Mais non : il a encore ce que, dans les illusions de ses jeunes années, il oublie, une âme. Plus tard, trop tard, il se souvient d’elle :

« Quand je fus arrivé à ce point de mon âge où chacun devrait abaisser les voiles et serrer les cordages,

« Ce qui, premièrement, me plaisait, alors me pesa ; repentant et confès je me fis : et bien, hélas ! m’en serais-je trouvé, pauvre misérable ! »

Cette réflexion, qui coupe son récit, et qui, tout d’un coup, ramène au dedans de soi ce pauvre misérable, ajoute encore à ses tourments celui d’un regret éternellement vain. Ce qu’il eût pu être aggravé le poids de ce qu’il est désormais pour toujours.

La voix de ce spectre a quelque chose de sépulcral qui fait frissonner comme celle du père d’Hamlet. Appelé par le grand Prêtre, qu’en passant il maudit, le voilà seul, face à face, avec ce Prince des nouveaux Pharisiens, qui l’a mandé pour guérir sa fièvre de superbe.

On croit voir apparaître l’Ange d’orgueil. La tentation commence. Ce que dit le Pontife, il ne le redit point. Que serait-ce auprès de ce mot : Je me tus, ses paroles me paraissant ivres ? Le Pape a remarqué ce silence d’étonnement et d’effroi ; il rassure le moine consterné, l’éblouit du pouvoir qui lui est commis, et l’absout d’avance du péché auquel il le pousse. Le