Page:Dante - La Divine Comédie, traduction Lamennais volume 1, Didier, 1863.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
168
INTRODUCTION.

deux, puis trois, et les autres se tiennent, toutes timides, l’œil et le museau à terre,

« Et ce que fait la première, les autres le font, se serrant derrière elle si elle s’arrête, simples et tranquilles, et le pourquoi elles ne le savent.

« Ainsi vis-je mouvoir, pour venir, la tête de ce troupeau alors fortuné, pudique de visage, modeste en sa démarche.

« Lorsque ceux-ci virent, à ma droite, la lumière rompue à terre par devant, de sorte que mon ombre atteignait la grotte,

« Elles s’arrêtèrent et se retirèrent un peu en arrière, et toutes les autres, qui venaient après, en firent autant[1]. »

Qui a vu les brebis sortir du bercail, les revoit dans les vers qu’on vient de lire. Ils offrent un exemple de l’admirable vérité des peintures de Dante, à qui, dans l’observation de la nature, aucun détail n’échappe, et qui les reproduit aussi fidèlement qu’un miroir réfléchit les objets. Jamais rien de faux, rien de vague, jamais non plus rien d’inutile ; pas un trait, pas une circonstance qui ne concoure à l’effet. Et remarquez quel calme, quelle tranquille lumière matinale ces images champêtres répandent sur des lieux cependant consacrés aux pleurs, et comme l’innocence de ces simples et douces et placides créatures se reflète sur

  1. Purgat., ch. III, ter. 18 et suiv.