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INTRODUCTION.

que tous sont effacés lorsqu’il arrive au sommet du mont, où est situé le Paradis terrestre.

Dans le premier cercle, les orgueilleux se traînent sous de lourdes pierres dont le poids les courbe jusqu’à terre. À la vue de ces infortunés, le Poëte se demande avec étonnement de quoi l’âme peut se gonfler, au point que, dans sa folle admiration de lui-même, l’homme oublie entièrement sa condition réelle, ce qu’il est, ce qu’il sera, alors qu’après sa transformation il comparaîtra devant la justice inévitable et inexorable.

« O chrétiens superbes, malheureux, débiles, qui, infirmes de la vue de l’esprit, vous fiez aux pas rétrogrades,

« Ne savez-vous donc point que nous sommes des vers nés pour devenir l’angélique papillon qui, sans que rien l’en défende, vole devant la Justice ?

« De quoi gonflée votre âme en haut flotte-t-elle ? Qu’êtes-vous, que des ébauches d’insectes, semblables au ver en qui avorte la transformation[1] ? »

Toutes les fois que l’homme se regarde attentivement, ce vide l’effraye : l’être a fui de toutes parts. Qu’est-il donc ? Une ébauche de ver ? moins que cela. Une ombre ? moins que cela. Le rêve d’une ombre[2] ? moins que cela encore. « Oh ! que nous ne sommes

  1. Purgat., ch. x, terc 41-43.
  2. Skias onar. Pindare.