Page:Dante Alighieri - La Vie nouvelle, traduction Durand Fardel.djvu/48

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Afin qu’ils m’en retournent leur avis,
Salut dans la personne de leur Seigneur, c’est-à-dire l’Amour.
Déjà étaient passées les heures
Où les étoiles brillent de tout leur éclat,
Quand m’apparut tout à coup l’Amour
Dont l’essence me remplit encore de terreur.
L’Amour me paraissait joyeux.
Il tenait mon cœur dans sa main
Et dans ses bras une femme endormie et enveloppée d’un manteau.
Puis il la réveillait et, ce cœur qui brûlait,
Il le lui donnait à manger, ce qu’elle faisait, craintive et docile.
Puis je le voyais s’en aller en pleurant[1].

Il vint plusieurs réponses à ce sonnet, et des opinions diverses furent exprimées. Parmi elles fut la réponse de celui que j’appelle le premier de mes amis. Il m’adressa un sonnet qui commence ainsi : « Il me semble que tu as vu la perfection[2]… » Et de là date le commencement de notre amitié mutuelle, quand il sut que c’était moi qui lui avais fait cet envoi. La véritable interprétation de ce sonnet ne fut alors saisie par personne. Mais aujourd’hui

  1. Commentaire du ch. III.
  2. Cet ami était Guido Cavalcanti, l’un des poètes les plus réputés de cette époque. Il avait répondu : Vedesti al mio parer ogni valore