Page:Darboy - Œuvres de saint Denys l’Aréopagite.djvu/433

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
429
CHAPITRE VIII.


rés nomment-ils puissance ce qui est par delà toute puissance ? Ou comment devons-nous entendre ce nom appliqué à la divinité ?

II. Nous affirmons donc que Dieu est puissance, parce que dès l’éternité il possède en lui toute puissance à un éminent degré ; parce qu’il est l’auteur de toute puissance ; parce qu’il a tout créé par sa puissance inaltérable et sans limites. Oui, il a produit la raison constitutive de toute puissance, tant générale que particulière. Il est infiniment fort, non-seulement en ce que toute puissance vient de lui, mais aussi en ce qu’il dépasse toute puissance réelle et même idéale ; en ce qu’il peut sans fin donner l’être à un nombre infini de puissances nouvelles ; en ce que sa puissance créatrice, se fût-elle exercée de mille manières à la production de mondes infinis, conserverait néanmoins toute sa fécondité et son énergie inépuisables ; et en ce qu’on ne saurait exprimer, ni connaître, ni comprendre cette puissance transcendante, qui par sa vigueur extraordinaire fortifie la faiblesse, et conserve jusqu’aux êtres où rayonnent même ses plus obscurs reflets : précisément comme on le remarque dans le monde physique, où une vive lumière frappe les yeux les plus débiles, et où de grands bruits parviennent jusqu’à l’oreille la plus dure. Je ne parle pas de ce qui est absolument sourd, car là il n’y a pas d’ouïe ; ni de ce qui est absolument aveugle, car là il n’y a pas de vue.

III. Ainsi à cause de son infinie richesse, la puissance divine se communique à tous les êtres. Rien de ce qui existe n’est radicalement dénué de quelque puissance ; mais toute chose a une force intellectuelle, ou raisonnable, ou vitale, ou du moins elle a l’être : et l’être, si l’on me permet cette manière de parler,