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II
INTRODUCTION.


Ces remarques sont parfaitement applicables aux livres dont on offre ici la traduction. On les connaît peu, on les étudie encore moins. Qui a entendu parler de saint Denys l’Aréopagite comme d’un philosophe distingué et d’un théologien sublime ? Je ne sais même pas si l’on vous pardonnerait d’invoquer son autorité comme antique et vénérable, quoiqu’il soit certainement impossible d’assigner à cet écrivain une date moins reculée que le quatrième siècle.

Eh bien ! quel est le principe de cette défaveur ? Est-ce la faiblesse ou le peu d’importance des écrits eux-mêmes ? Mais la philosophie n’a rien produit d’aussi élevé et d’aussi pur, l’antiquité ecclésiastique n’a guère d’ouvrages plus remarquables. N’est-ce pas plutôt le doute qu’on éleva sur leur authenticité ? Je le pense assurément. Faut-il donc admettre que ces œuvres soient apocryphes ? Il est beaucoup plus facile de faire voir qu’elles ne le sont pas. Alors pourquoi les flétrir, à raison de leur supposition qui est moins certaine, et non pas les honorer à cause de leur authenticité qui est plus probable ? Ensuite pourquoi cet anathème préventif ne reculait-il pas devant la valeur intrinsèque et le mérite réel des livres dont il s’agit ? C’est qu’en matière d’honneur et de légitimité, un soupçon est toujours chose grave, souvent chose mortelle ; et puis encore, c’est précisément un de ces cas d’injustice dont j’ai parlé plus haut.

Ainsi deux questions se présentent : les ouvrages attribués à saint Denys l’Aréopagite sont-ils véritablement de lui ? puis quelle utilité et quelle portée faut-il leur reconnaître ?

D’abord l’opinion que ces livres sont apocryphes, opinion mise à la mode par des hommes d’un catholicisme douteux, et amicalement saluée par le protestantisme en foule, est-elle la mieux fondée en raison ? Nous sommes loin de le penser. Il ne suffit pas de quelques sophismes acerbes, ni d’un peu de bel esprit, pour se dispenser d’un examen approfondi, ou pour rendre une décision sans appel.