Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/124

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— Y a que ça à faire, déclare tranquillement une espèce de gringalet à la figure osseuse, pâle sous le hâle, aux membres grêles, à la bouche crispée de voyou parisien dont il a l’accent canaille ; et, s’ils rouspètent, y a qu’à les faire en douceur, au père François. Tu sais, Crocodile, le coup du foulard ?

Et il fait le geste, tranquillement cynique, grinçant un : crac ! qui fait courir son rictus d’une oreille à l’autre et lui donne une physionomie d’un comique effrayant. Il le ferait comme il le dit, d’ailleurs, cet astèque qu’on a surnommé Acajou à cause de ses cheveux rouges et qui se vante d’avoir, à Paris, au cours d’une rixe, saigné un cogne dans l’escalier d’un bastringue.


— Voulez-vous marcher, oui ou non ? s’écrie un pied-de-banc que le capitaine a envoyé pour hâter l’allure des retardataires et qui est arrivé à notre groupe.

— Sergent, répond Barnoux avec urbanité, je vous ferai observer que la marche s’exécute par une série de pas. Nous exécutons une série de pas. Donc, nous sommes en marche.

Acajou proteste.

— La marche, c’est pas ça. La marche, c’est ce qui vous tire des larmes des pieds.

— Il est évident, ajoute Rabasse, sans se soucier de l’interruption, que, puisqu’il n’est question que de la marche et non de sa rapidité, la succession plus ou moins prompte des susdits pas ne fait absolument rien à l’affaire.

— Avez-vous fini de me répondre, nom de Dieu ! hurle le chaouch. Je vais tous vous fourrer dedans.

Acajou s’approche de lui :