Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/310

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quartier de viande. J’ai fermé la porte sur moi, à toute volée, et je me suis laissé tomber sur la banquette.

Brusquement, je me suis senti libre. J’ai éprouvé, pendant une minute, une jouissance indéfinissable. Pour la première fois de ma vie ― la seule peut-être ― j’ai perçu, dans sa plénitude, la sensation de liberté.

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— Froissard, as-tu faim ? Veux-tu manger un morceau ?

Ce sont mes camarades de route qui finissent leurs provisions, avant d’arriver à Paris, et qui m’invitent à casser la croûte.

Non, je n’ai pas faim ; non, je ne veux pas manger. Il me semble que je n’aurai plus jamais besoin de manger.


— Ah ! non, toi, là-bas, garde le cervelas pour toi. Il y a de l’ail dedans, et, comme on va sucer la pomme à sa gonzesse…

De gros rires.


Quatre faubouriens, sur les sept que nous sommes. Quatre ouvriers qui vont reprendre leur métier, en arrivant, avec la misère qui les guettera au coin de l’établi et la débauche qui leur fera signe, au premier tournant de la rue. Rien à attendre d’eux, rien. Des récits fantastiques de leurs campagnes, peut-être, des histoires à dormir debout, des exagérations idiotes, des hâbleries… Ah ! il n’y a pas de danger qu’ils aillent porter, dans l’atelier, sur les chantiers, le récit