Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/87

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semelles ; avec un peu d’industrie, il pourrait même réserver de quoi fabriquer les talons. Elle m’étonne, cette visière ; je n’en reviens pas. Quel a été le dessein du gouvernement en dotant les compagnies de discipline d’un couvre-chef comportant un accessoire de dimensions aussi exagérées ? A-t-il voulu faire preuve de sa mansuétude, même envers des indignes, en leur donnant le moyen de préserver des coups de soleil leurs nez indisciplinés ? N’a-t-il pas plutôt voulu leur fournir un petit meuble portatif, une tablette toujours utile dans les hasards des campements et qui peut leur servir à déposer la portion retirée de leur gamelle ou à étendre la feuille de papier à lettres qui doit porter de leurs nouvelles à leurs parents ?

— Êtes-vous gêné dans votre uniforme ? me demande le sergent d’habillement.

Pas le moins du monde. Je danse dedans. Les jambes du pantalon ressemblent à deux sacs dans lesquels mes tibias se perdent ; je pourrais mettre un locataire dans la capote. Quant au képi, deux fois trop grand, il ne me descend pas tout à fait sur les yeux parce que mes oreilles l’arrêtent en route.

— Ça va bien. Tenez, voilà un fourniment, un fusil, un sac. Et votre veste, vous l’oubliez ?

C’est vrai, j’oubliais ma veste que je n’ai pas essayée et qui est restée par terre. Le sergent paraît furieux de ma négligence.

— La veste, ici, constitue la grande tenue. Vous entendez ? Pour le travail, vous mettrez votre pantalon de treillis et votre blouse. Pour les appels et à partir de la soupe du soir, le pantalon de drap et la capote. Le pantalon de drap et la veste sont réservés pour les circonstances exceptionnelles.

Ça me paraît très logique. En effet, si les soldats de