Page:Darien - L'ami de l'ordre, 1898.djvu/24

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L’ABBÉ, comme en rêve.

Oh ! cette douloureuse agonie ! Cette montée de Calvaire ! Oh ! si cet homme croyait, s’il avait la foi, ç’a dû être pour lui une souffrance sans nom, cet effroyable écroulement de tous ses rêves à mesure que coulait son sang. Mais c’est un martyr, que cet homme ! (Se ressaisissant.) Non ! non ! ce n’est pas un prêtre qui l’a dénoncé ! Cela ne se peut pas ! Un ministre du Dieu de bonté, de celui qui a dit : « Paix sur la terre, bonne volonté parmi les hommes. » Non ! Non !

MONSIEUR BONHOMME, joyeux et criant.

Il l’a dénoncé ! Il l’a dénoncé, monsieur le curé ! Je l’ai vu !…

L’ABBÉ, atterré.

Alors… alors… si… si cela est… il a dû demander au moins qu’on le juge, qu’on le fasse passer devant un tribunal… s’opposer à l’exécution sommaire… Car, enfin, il n’est pas possible qu’on tue des hommes ainsi… sans forme de procès… comme des bêtes fauves…

MONSIEUR BONHOMME, ricanant.

Ah ! ah ! ah !… Ce n’est pas possible !… Ah ! ah ! ah !… On les colle le long d’un mur… Joue ! Feu ! Ce n’est pas plus long que ça. Ils n’ont pas le temps de dire : « Ouf ! »… Si vous voyiez ça, monsieur le curé…

L’ABBÉ.

C’est affreux ! Ah ! je crois que j’en deviens fou, de tout cela. Je voudrais pouvoir me cacher dans un trou, je ne sais où, pour ne plus rien voir, ne plus