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LE VOLEUR

lène de Bois-Créault s’est portée partie civile au procès et demande au meurtrier de son mari d’énormes dommages-intérêts. Elle en aura une bonne partie, dit la gazette. Ce suicide pitoyable sur le corps de ce malheureux être, cette exploitation de son cadavre… Ah ! la vie !… Quelle farce ! — jouée dans quel abattoir !…

La seconde fois que j’ai interrompu mon travail, ç’a été pour faire une invention. Il ne faut pas laisser oublier que je suis ingénieur et ma découverte, lorsque j’en publierai prochainement les détails dans une revue spéciale, me fera certainement beaucoup d’honneur. J’ai inventé l’Écluse à renversement. Ce n’est, à vrai dire, qu’un perfectionnement ; fort ingénieux, toutefois. Rien n’était plus simple, je l’accorde, que d’en concevoir l’idée ; mais encore fallait-il l’avoir. Mon intention n’est pas de faire ici le compte rendu technique de ma découverte ; je tiens cependant à en donner un léger aperçu. Voici la chose en deux mots : Supposons l’écluse fermée…


— Supposons-la fermée et ne la rouvrons pas ! s’écrie Roger-la-Honte qui entre sans s’être fait annoncer, au moment même où j’écris la phrase en la prononçant tout haut. Ah ! ça, qu’est-ce que tu fais là ? Tu écris encore tes mémoires ?

— Tout juste.

— Eh ! bien, je vais te raconter une petite histoire que tu pourras sans doute utiliser ; elle est assez cocasse. Figure-toi que le nommé Stéphanus — tu sais bien ? cet employé d’une banque belge qui nous donne des tuyaux — est venu me voir hier. Son patron, qui s’appelle Delpich, veut se faire dévaliser. Un vol simulé, tu comprends, pour couvrir les détournements qu’il a l’intention d’opérer. On me propose cinq mille francs pour aller, dans trois jours, éventrer un coffre-fort où il n’y aura plus rien et forcer des tiroirs mis à sec.

— Je vois ça, dis-je. Mais ce coffre-fort, qui sera