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LE VOLEUR

femme-là, autant que j’en puis juger dans la demi-obscurité ; je ne l’ai jamais vue. Qui est-ce ? Une faucheuse ?… Elle reste prosternée à mes pieds, gémissant à fendre l’âme. Dangereux, le bruit de ces sanglots ; il faut prendre une décision.

— Madame, dis-je d’une voix rude, votre vie est entre vos mains. Cessez de pleurer, s’il vous plaît, si vous voulez que je vous épargne. Relevez-vous et donnez-vous la peine de vous asseoir, pour changer. Tenez, voici une chaise… Maintenant, veuillez me dire qui vous êtes et ce que vous faites ici à pareille heure.

— Je suis madame Delpich, murmure cette femme en émoi, tout en s’essuyant les yeux ; et mon mari m’a chargée de garder son bureau pendant son absence.

Bizarre ! Et cette tentative d’effraction, à côté ?

— Madame, dis-je sévèrement, je crois que vous ne m’avouez pas tout ; je vous préviens que vous courez de grands risques en me cachant quelque chose. Comment expliquez-vous, si vous êtes réellement madame Delpich, que le secrétaire se trouve dans un état…

— Ah ! interrompt-elle en cachant sa figure dans ses mains, c’est moi qui ai essayé de le forcer. Mais si vous saviez… si je vous disais…

— Dites-moi. Mais, d’abord, laissez-moi allumer le gaz ; on ne voit presque rien avec cette lanterne… Voilà qui est fait. Allez, Madame. Racontez-moi pourquoi vous vouliez forcer les meubles de votre mari.

— Pour y prendre des lettres, monsieur, dit-elle, des lettres de ma mère. Ma mère… c’est un secret de famille que je vous révèle, mais je vois bien qu’il faut vous dire toute la vérité… ma mère a eu un amant. Oui, Monsieur, un amant. Ah ! la pauvre femme ! Elle a assez regretté un instant de folie… Elle m’écrivait tous les jours combien elle déplorait sa faute, combien elle était désolée d’avoir contracté