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qu’on voit rouler la nuit et la lune, la lune, le jour, et la nuit et les astres tristes de la nuit, et les flambeaux nocturnes errant dans le ciel, et les flammes volantes, les nuées, le soleil, les pluies, la neige, « les vents, les foudres, la grêle et les frémissements rapides et les grands murmures menaçants[1]. » Cette vue du ciel, siège universel des mouvements de la nature, pouvait aussi bien mener au panthéisme qu’au théisme. Le vers du poète :

 
Juppiter est quodcunque vides, quocunque moveris
« Jupiter est tout ce que tu vois, partout où tu te meus. »


n’exprime point seulement le Jupiter des métaphysiciens du Portique ; il exprime aussi une des faces du Jupiter de la mythologie primitive. Ce n’est point par une déviation de sa valeur première que Zeus se confond avec Pan : il l’était de naissance, et si l’épopée et le drame ne nous montrent en lui que le dieu personnel, c’est que l’un et l’autre, par leur nature même, ne pouvaient, ne devaient voir de lui que cet aspect et n’avaient rien à tirer du Zeus impersonnel, quoique aussi ancien. Quand Aristote appelle Ouranos « ciel » le cercle entier du monde visible, il n’est pas infidèle aux traditions premières de la religion, et pas

  1. Prœterea, cœli rationes ordine certo
    Et varia annorum cernebant tempora vorti,
    Nec poterant quibus id fieret cognoscere causis.
    Ergo perfugium sibi habebant omnia Diveis
    Tradere, et ollorum nutu facere omnia flecti.
    In cœloque Deum sedes et templa locarunt,
    Per cœlum volvi quia nox et luna videtur,
    Luna, dies, et nox, et noctis signa severa,
    Noctivagæque faces coeli, flammæque volantes,
    Nubila, sol, imbres, nix, ventei, fulmina, grando,
    Et rapidei fremitus, et murmura magna minarum.

    ______________LIVRE V, 1187.