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BÊTES BOVINES.

les frontaux et les lacrymaux, et ces derniers s’articulant avec les maxillaires, il ne peut ainsi y avoir de contact entre ces os et les nasaux. » La connexion de quelques os se trouve donc ainsi changée. On peut signaler encore d’autres différences ; ainsi le plan des condyles est quelque peu modifié, et le bord terminal des maxillaires supérieurs forme un arc. En fait, comparé au crâne d’un bœuf ordinaire, presque pas un os ne présente la même forme, et le crâne entier a une apparence tout à fait différente.

C’est Azara qui a publié la première courte notice sur cette race, de 1783–96. Don F. Muniz, de Luxan, qui a pris pour moi des renseignements sur ce sujet, m’apprend qu’en 1760, on gardait à Buenos-Ayres ces animaux comme curiosité. On ignore leur origine exacte, mais elle doit être postérieure à 1552, époque de la première introduction du bétail. Le señor Muniz m’informe qu’on croit que cette race a pris naissance chez les Indiens du sud de la Plata. Ceux élevés près de la rivière de la Plata témoignent d’une nature moins civilisée par plus de sauvagerie, et la vache abandonne souvent son premier veau, si on la visite trop souvent. La race est bien constante, et taureau et vache niatas produisent invariablement un veau niata ; elle dure déjà depuis au moins un siècle. Les croisements d’une vache ordinaire avec un taureau niata, ou l’inverse, donnent des produits offrant des caractères intermédiaires, mais ceux de la race niata sont fortement accusés. D’après le señor Muniz, il est très-évidemment prouvé, contrairement à l’opinion ordinaire des agriculteurs en pareil cas, que la vache niata croisée avec le taureau commun, transmet ses caractères spéciaux plus fortement que ne le fait le taureau niata croisé avec la vache commune. Quand l’herbe est longue, ces animaux mangent comme le bétail ordinaire au moyen de la langue et du palais ; mais pendant les longues périodes de sécheresse, alors que tant d’animaux périssent dans les Pampas, la race niata se trouve dans une position très-désavantageuse, et finirait par s’éteindre, si on ne venait à son aide ; en effet, le bétail ordinaire et les chevaux peuvent encore se maintenir en vie, en broutant du bout des lèvres les branchilles des arbres : ceci étant impossible aux niatas dont les lèvres ne se joignent pas, ils sont donc condamnés à périr avant le bétail ordinaire. Ce