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CAUSE DES VARIATIONS.

souche Canley pure, n’a hérité de presque aucun autre trait de la race à longues cornes, que ses cornes ; et cependant ce taureau, entre les mains de M. Fowler, a grandement amélioré sa race. Nous avons des raisons de croire que la sélection, bien qu’exercée involontairement et sans aucune intention arrêtée d’améliorer ou de changer les races, a dans le cours des temps modifié la plupart de nos bestiaux, et que c’est par ce moyen, aidé par une augmentation de nourriture, que toutes les races anglaises des terrains bas ont considérablement augmenté de taille et gagné en précocité depuis le règne de Henri VII[1]. Il ne faut pas oublier que chaque année on abat un grand nombre d’animaux, et que chaque éleveur a constamment à déterminer ceux qu’il tuera et ceux qu’il conservera pour la reproduction. Dans chaque endroit, selon la remarque de Youatt, il y a un préjugé en faveur de la race locale, de sorte que les animaux possédant les qualités, quelles qu’elles soient, les plus estimées dans chaque district, seront les plus souvent conservés, et cette sélection non méthodique n’en affectera pas moins certainement, pendant une série de générations un peu prolongée, les caractères de la race entière. Mais, dira-t-on peut-être, une sélection même aussi grossière a-t-elle pu être pratiquée par des barbares comme le sont les habitants du sud de l’Afrique ? Nous verrons, dans le chapitre sur la sélection, que cela a certainement eu lieu jusqu’à un certain point. En conséquence, quant à l’origine des nombreuses races de bétail qui ont habité autrefois les différentes parties de l’Angleterre, je conclus que, bien qu’une foule de circonstances, telles que de légères différences dans la nature du climat, de la nourriture, des changements de conditions et d’habitudes, la corrélation de croissance, l’apparition incidente de causes inconnues de déviations de structure ; bien que toutes ces circonstances aient probablement joué un certain rôle, cependant la conservation occasionnelle, dans chaque localité, des individus les plus estimés par leurs propriétaires, est peut-être ce qui doit avoir le plus contribué à la production des diverses races britanniques. Dès que, dans un district, il se sera formé une ou deux races, ou qu’il s’y sera introduit des races nouvelles des-

  1. Youatt, On Cattle, p. 116. — Lord Spencer a écrit sur ce même sujet.