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LEUR ORIGINE.

couleur sur le dos. Ces tachetures sont formées par une large marque noire occupant les deux côtés, mais surtout le côté externe de chaque plume. Les barres des ailes du vrai Bizet et de la variété tachetée sont produites également par des taches plus grandes traversant symétriquement la rémige secondaire et les plus grandes plumes tectrices. Les tachetures ne sont donc que l’extension, à d’autres parties du plumage, des marques ordinaires. Les oiseaux tachetés ne sont pas circonscrits aux côtes d’Angleterre, car Graba les a trouvés aux Feroë, et M. Thompson[1] dit qu’à Islay, la moitié des Bizets sauvages sont tachetés. Le colonel King de Hythe, a peuplé son pigeonnier de jeunes oiseaux sauvages capturés par lui dans les îles Orkney, et m’en a obligeamment envoyé plusieurs individus qui étaient tous nettement tachetés. Nous voyons donc que les Pigeons tachetés se rencontrant dans trois sites distincts, aux Feroë, aux Orkney et à Islay, parmi les Bizets, il n’y a aucune importance à attacher à cette variation naturelle du plumage.

Le prince C. L. Bonaparte[2], sépare de la C. livia, avec un point d’interrogation, la C. turricola d’Italie, la C. rupestris de Daouria, et la C. Schimperi d’Abyssinie ; mais ces oiseaux ne diffèrent du Bizet que par des caractères insignifiants. Il y a, au Muséum Britannique, un Pigeon tacheté d’Abyssinie qui est probablement le C. Schimperi de Bonaparte. On peut y joindre le C. gymnocyclus de G. R. Gray, de l’Afrique occidentale, qui est un peu plus distinct, et porte autour de l’œil un peu plus de peau dénudée que le Bizet, mais d’après des informations que je tiens du Dr Daniell, il est douteux que cet oiseau soit sauvage, car, comme je m’en suis assuré, on élève sur la côte de Guinée des Pigeons de colombier.

Le Bizet sauvage de l’Inde (C. intermedia de Strickland) a été plus généralement admis comme une espèce distincte. Il diffère surtout par la couleur du croupion qui est bleue au lieu d’être blanche, mais cette teinte varie, selon M. Blyth, et devient quelquefois albescente. Domestiquée, cette forme fournit des oiseaux tachetés, comme cela arrive en Europe avec le vrai Bizet. Nous avons, au surplus, la preuve que la couleur du croupion est éminemment variable, car Bechstein[3] nous apprend qu’en Allemagne ce caractère du plumage est chez le Pigeon de colombier de tous le plus changeant. Nous devons en conclure qu’on ne doit pas considérer la C. intermedia comme spécifiquement distincte de la C. livia.

On trouve à Madère un Bizet que quelques ornithologistes supposent être distinct de la C. livia. J’en ai examiné un grand nombre d’individus recueillis par MM. Harcourt et Mason. Ils sont plutôt plus petits que les Bizets des îles Shetland, leurs becs sont plus minces et varient d’épaisseur suivant les individus. Ils offrent une diversité remarquable dans leur plumage ; quelques individus sont plume pour plume identiques au Bizet shetlandais, d’autres sont tachetés comme la C. affinis des falaises d’Angle-

  1. Natural Hist. of Ireland. — Birds, v. II, 1850, p. 11. — Pour Graba, voir l’ouvrage cité, note 10.
  2. Coup d’œil sur l’ordre des Pigeons. Comptes rendus, 1854–55.
  3. Naturgesch, Deutschlands, vol. IV, 1795, p. 14.