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SÉLECTION NATURELLE.

et les règles de la classification s’expliquent très-naturellement par le principe de la descendance, joint aux modifications apportées par la sélection naturelle, qui entraîne la divergence des caractères et l’extinction des formes intermédiaires. Dans la doctrine d’actes de création indépendants, comment expliquer la conformation sur un plan commun, de la main de l’homme, du pied du chien, de l’aile de la chauve-souris, et de la palette du phoque ? L’explication est toute simple d’après le principe de la sélection naturelle de légères variations successives dans la descendance divergente d’un seul ancêtre ! De même, quand examinant la structure d’un individu, animal ou plante, nous voyons construits sur le même modèle les membres antérieurs et postérieurs, le crâne et les vertèbres, les mâchoires et les pattes des crustacés ; les pétales, les étamines et le pistil d’une fleur. Pendant les nombreuses modifications que, dans le cours des temps, tous les êtres organisés ont dû subir, le défaut d’usage a pu occasionnellement réduire peu à peu certains organes, devenus finalement superflus, mais la conservation de ces parties à un état rudimentaire et complètement inutile à l’individu qui les possède se conçoit facilement dans la théorie de la descendance. D’après le principe que les modifications sont héritées par le jeune être au même âge où chaque variation successive a apparu pour la première fois chez son ascendant, nous comprendrons pourquoi les organes et parties rudimentaires sont généralement bien développées chez l’individu dans son très-jeune âge. Le même principe de l’hérédité aux âges correspondants, joint à celui que les variations n’interviennent généralement pas dans les toutes premières périodes du développement embryonnaire (deux principes dont l’observation directe montre la probabilité), rendent intelligible un des faits les plus remarquables de l’histoire naturelle, à savoir, la similitude de tous les membres de la grande classe des vertébrés, mammifères, oiseaux, reptiles et poissons, pendant la période embryonnaire.

C’est la considération et l’explication de faits de cette nature qui m’ont convaincu que la théorie de la descendance avec modification par la sélection naturelle est, en somme, la vraie. Dans la théorie des créations indépendantes, ces faits n’ont pu