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POMMES DE TERRE.

croisements accidentels de cette nature, et leur existence passagère à des fluctuations de la mode ; ou encore les variétés qui naissent après une longue période de fécondation en dedans, sont-elles plus faibles et plus sujettes à périr ; c’est ce que je ne saurais dire. On peut toutefois noter que plusieurs des variétés d’Andrew Knight, qui ont duré plus longtemps que beaucoup d’autres, sont nées vers la fin du siècle dernier de croisements artificiels. Quelques-unes étaient encore vigoureuses en 1860, mais en 1865[1], un auteur parlant de quatre variétés de Knight, dit qu’elles avaient acquis une histoire fameuse, mais que leur réputation était partie.

Quant aux fèves (Faba vulgaris) je serai bref. Le Dr Alefeld[2] a donné une courte diagnose de quarante variétés. Il suffit d’en voir une collection pour être frappé de la différence qu’elles présentent dans la forme, l’épaisseur, les proportions de longueur et largeur, la couleur et la grosseur. Comme pour le pois, nos variétés actuelles ont été, pendant l’âge de bronze, en Suisse, précédées par une forme spéciale portant de très-petites fèves, et actuellement éteinte[3].

Pomme de terre (Solanum tuberosum). — Il n’y a pas de doute à concevoir sur l’origine de cette plante, dont les variétés cultivées diffèrent extrêmement peu par leur apparence générale, de l’espèce sauvage qu’on reconnaît au premier coup d’œil[4] dans son pays natal. Les variétés cultivées en Angleterre sont nombreuses ; Lawson[5] en décrit 175 sortes. J’ai planté dans des raies voisines, dix-huit sortes différentes ; les tiges et feuilles différaient peu, et dans plusieurs cas il y avait, sous ce rapport, autant de différences entre les individus d’une même variété, qu’entre les diverses variétés elles-mêmes. Les fleurs varient de grandeur, et du blanc au pourpre pour la couleur, mais pas sous d’autres rapports, une seule forme exceptée, chez laquelle les sépales étaient un peu allongés. On a décrit une variété singulière, qui produit toujours deux sortes de fleurs, dont les unes sont doubles et stériles, les autres simples et fertiles[6]. Les baies varient aussi, mais très-légèrement[7].

Les tubercules, d’autre part, offrent une variété étonnante, et confirment le principe que les modifications les plus étendues affectent toujours, dans toutes les productions cultivées, les parties recherchées et estimées de la plante. Ils diffèrent beaucoup par la forme et la couleur, et sont sphériques, ovales, aplatis, réniformes ou cylindriques. On a décrit[8] une variété du Pérou comme droite, pas plus grosse qu’un doigt et ayant six pouces de longueur. Les yeux ou bourgeons diffèrent aussi par la forme, la position et la couleur. La disposition des tubercules sur les tiges varie ;

  1. Gardener’s Chronicle, 1865, p. 387.
  2. Bonplandia, X, 1862, p. 348.
  3. O. Heer, Die Pflanzen, etc., 1866, p. 22.
  4. Darwin, Journal of Researches, 1845, p. 285.
  5. Synopsis of vegetable products of Scotland, cité dans Wilson. British Farming, p. 317.
  6. Sir G. Mackensie, Gardener’s Chronicle, 1845, p. 790.
  7. Putsche und Vertuch, Versuch einer Monographie der Kartoffeln, 1819, p. 9, 15. — Anderson, Recreations on Agriculture, vol. IV, p. 325.
  8. Gardener’s Chronicle, 1862, p. 1052.