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LEUR VARIATION.

la nature du poil, la couleur, etc., ce qui n’a rien d’étonnant vu l’extrême antiquité de la domestication de cette forme soit en Europe, soit en Chine. D’après un savant sinologue[1], elle remonterait, dans ce dernier pays, au moins à 4,900 ans en arrière. Le même auteur signale l’existence en Chine d’une foule de variétés locales du porc auxquelles les Chinois donnent des soins minutieux, ne leur permettant pas même de changer de place[2]. Aussi, comme le fait remarquer Nathusius[3], la race chinoise possédant au plus haut degré les caractères d’une race artificielle très-perfectionnée, doit à cette circonstance sa grande valeur pour l’amélioration de nos races européennes. Cet auteur (Schweineschädel, p. 138) constate que l’introduction dans une race du type Sus scrofa, de 1/32e ou même seulement de 1/64e de sang Sus indicus, suffit pour modifier le crâne de la première. Ce fait singulier peut s’expliquer peut-être par ce que les principaux caractères qui distinguent le Sus indicus, tels que le raccourcissement des os lacrymaux, etc., sont communs à plusieurs des espèces du genre, et on sait que dans les croisements les caractères qui existent dans plusieurs espèces tendent à devenir prépondérants sur ceux qui n’appartiennent qu’à un petit nombre.

Le porc du Japon (Sus pliciceps, de Gray), qui a été récemment exposé dans le Jardin zoologique, offre, par sa tête très-courte, son front et son groin très-larges, ses grandes oreilles charnues et les profonds sillons de sa peau, un aspect très-extraordinaire. La figure que nous en donnons est copiée de celle donnée par M. Bartlett[4]. Non-seulement la face est profondément sillonnée, mais d’épais replis d’une peau, plus dure que celle des autres parties du corps, pendent autour des épaules et de la croupe, comme les plaques du rhinocéros indien. Il est noir avec les pieds blancs et reproduit fidèlement son type. Il n’y a aucun doute que sa domestication ne soit fort ancienne, on aurait pu l’inférer du fait que les jeunes ne sont pas longitudinalement rayés, caractère qui est commun à toutes les espèces du genre Sus et genres voisins, à l’état

  1. Stanislas Julien, cité par de Blainville, Ostéographie, p. 163.
  2. Richardson, Pigs, their origin, etc., p. 26.
  3. Die Racen des Schweines, p. 47, 64.
  4. Proc. Zoolog. Soc., 1861, p. 263.