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SÉLECTION.

différents que soient les becs du bizet et du chardonneret, le but a été presque atteint, en ce qui concerne du moins les proportions et la forme extérieure.

Il ne faut pas seulement examiner avec soin les animaux vivants, mais comme dit Anderson[1], il faut encore scruter leur cadavre, et ne réserver pour la reproduction que les descendants de ceux qui, selon l’expression des bouchers, se laissent bien découper.

On a réussi à obtenir dans le bétail un grain voulu dans la viande, une distribution et une marbrure égales de la graisse[2], et un dépôt plus ou moins considérable de cette dernière dans l’abdomen des moutons. Un auteur[3] parlant des Cochinchinois, qui diffèrent beaucoup par la qualité de leur chair, recommande d’acheter deux coqs frères, d’en tuer un, de l’apprêter et de le servir ; s’il est médiocre, on peut disposer de la même manière de l’autre, si au contraire il est fin et de bon goût, on pourra conserver le frère pour la reproduction.

On a appliqué à la sélection le principe de la division du travail. Dans certaines localités[4], on confie l’élève des taureaux à un nombre limité de personnes, qui, vouant toute leur attention à ce point, peuvent d’année en année livrer des taureaux qui améliorent constamment la race du district. L’élève et le louage des béliers de choix ont été longtemps une des principales sources de profit de plusieurs éleveurs célèbres. Ce principe est poussé à l’extrême en Allemagne pour le mouton mérinos[5]. On regarde une bonne sélection des animaux reproducteurs comme si importante, « que les meilleurs possesseurs de troupeaux ne se fient ni à leur propre jugement ni à celui de leurs bergers, mais emploient des classificateurs de moutons, qui sont spécialement chargés de s’occuper de cette partie de l’aménagement des troupeaux, et de conserver ainsi ou d’améliorer si possible les bonnes qualités des parents chez leurs agneaux. En Saxe, lorsque les agneaux sont sevrés, on les place tous à leur tour sur une table, pour

  1. Recreations in Agriculture, vol. II, p. 409.
  2. Youatt, On Cattle, p. 191, 227.
  3. Fergurson, Prize Poultry, 1854, p. 208.
  4. Wilson, Trans. Highland Agr. Soc., cité dans Gard. Chronicle, 1844, p. 29.
  5. Simmoods, cité dans Gardener’s Chronicle, 1855, p. 637. — Youatt, On Sheep, p. 171.