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LES PAMPAS.

petites branches une élégante habitation voûtée où il va se livrer à mille jeux et près de laquelle il rassemble des coquillages, des ossements et des plumes d’oiseaux, tout particulièrement des plumes brillantes. M. Gould, qui a décrit ces faits, m’apprend que les naturels vont visiter ces galeries quand ils ont perdu quelque chose de dur, et il a vu retrouver une pipe de cette façon.

Le petit hibou (Athene cunicularia), dont j’ai déjà parlé si souvent, habite exclusivement, dans les plaines de Buenos Ayres, les trous des Viscaches ; dans le Banda oriental, au contraire, cet oiseau creuse son propre nid. Pendant la journée, mais plus particulièrement le soir, on peut voir dans toutes les directions ces oiseaux posés, la plupart du temps par couples, sur le petit monticule de sable qui accompagne leur terrier. Si on les dérange, ils rentrent dans leur trou ou s’envolent à quelque distance, en poussant un cri aigu ; puis ils se retournent et considèrent attentivement quiconque les poursuit. Quelquefois, le soir, on les entend pousser le cri particulier à leur espèce. J’ai trouvé dans l’estomac de deux de ces oiseaux les restes d’une souris ; un jour, j’en vis un emporter dans son bec un serpent qu’il venait de tuer ; c’est là, d’ailleurs, ce qui, dans la journée, constitue leur proie principale. Peut-être est-il bon d’ajouter, pour prouver qu’ils peuvent se nourrir de toutes sortes d’aliments, que l’estomac de quelques hiboux tués dans les îlots de l’archipel de Chonos était plein de crabes assez gros. Dans l’Inde[1], il y a un genre de hiboux pêcheurs qui attrapent aussi les crabes.

Dans la soirée, nous traversons le rio Arrecife sur un simple radeau fait de barils liés ensemble, et nous passons la nuit à la maison de poste située de l’autre côté de la rivière. Je paye la location du cheval que j’ai monté, calculée sur 31 lieues parcourues, et, bien qu’il ait fait très-chaud, je ne me sens pas trop fatigué. Quand le capitaine Head parle de 50 lieues faites en un jour, je ne crois pas que ce soit une distance équivalant à 150 milles anglais ; dans tous les cas, les 31 lieues que j’ai parcourues ne représentaient que 76 milles anglais (122 kilomètres) à vol d’oiseau, et je crois que, dans un pays aussi ouvert que l’est celui-ci, si on ajoute 4 milles pour les détours, on est bien près de la vérité.

29 et 30 septembre. — Nous continuons notre voyage à travers des plaines ayant absolument le même caractère. À San-Nicolas, j’aper-

  1. Journal of Asiatic Soc., vol. V, p. 363.