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ILE KEELING.

pantes, arrivent en parfait état ; mais les graines molles, telles que celles du mangostin, ont perdu leur pouvoir de germer. Enfin on a trouvé sur la côte des canots de pêche venant probablement de Java. » Il est fort intéressant de voir combien sont nombreuses les graines qui, provenant de plusieurs pays, sont transportées à travers l’immensité de l’Océan. Le professeur Henslow m’affirme que presque toutes les plantes que j’ai rapportées de ces îles sont des espèces qui croissent communément sur la côte dans l’archipel Indien. Mais la direction des vents et des courants semble opposer un obstacle insurmontable à ce qu’elles viennent ici en droite ligne. Si, comme l’a suggéré avec beaucoup de raison M. Keating, ces graines ont été d’abord transportées sur la côte de la Nouvelle-Hollande, pour revenir ensuite ici avec les produits de ce dernier pays, les graines, avant de trouver un terrain propre à leur développement, ont dû parcourir un espace variant entre 1 800 et 2 400 milles.

Chamisso[1], en décrivant l’archipel Radack, situé dans la partie occidentale de l’océan Pacifique, constate que « la mer apporte sur ces îles les graines et les fruits de bien des arbres inconnus dans l’archipel. La plus grande partie de ces graines ne semble pas avoir perdu la faculté de germer. » On dit aussi qu’on a trouvé sur ces côtes, des palmiers et des bambous, provenant de quelques pays de la zone torride, et des troncs de pins septentrionaux ; ces pins doivent avoir parcouru une distance immense. Ces faits sont très-intéressants ; on ne peut douter que, s’il y avait des oiseaux terrestres pour ramasser les graines dès qu’elles arrivent sur la côte, et que le sol fût mieux adapté à leur croissance, la plus désolée de ces îles posséderait bientôt une flore beaucoup plus abondante que celle qu’elles ont aujourd’hui.

La liste des animaux terrestres est encore plus pauvre que celle des plantes. Un rat, apporté dans un bâtiment venant de l’île Maurice, qui a fait naufrage ici, habite quelques-uns des îlots. M. Waterhouse considère ces rats comme identiques avec l’espèce anglaise, ils sont toutefois plus petits et plus brillamment colorés. On ne trouve pas de véritables oiseaux terrestres, car une bécasse et un râle (Rallus Philippensis), bien que vivant entièrement dans les herbes sèches, appartiennent à l’ordre des Échassiers. On dit que des oiseaux de cet ordre se trouvent dans plusieurs petites îles basses

  1. Kotzebue, First Voyage, vol. III, p. 155.