Page:Dash - Un amour coupable.djvu/305

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se refusait toute nourriture ; elle pleurait, assise ou plutôt couchée sur un sopha. Elle resta ainsi jusqu’au soir. Madame Dandolo avait cessé de l’importuner, voyant qu’elle n’en obtenait que des impertinences. Armand rentra, mais il ne les troubla pas. Depuis le matin, un changement réel s’opérait en lui. Il se sentait meilleur ou du moins jamais il ne s’était senti si désolé de ne pas être bon.

— Laissons-les, ces pauvres femmes, pensa-t-il, je les ai fait assez souffrir. Qu’elles se reposent !

Il ne dormit pas de la nuit. Au point du jour, au moment où il partait pour l’enterrement des deux victimes, on lui signala une ordonnance. Le général en chef le constituait commandant des environs, en lui donnant tout pouvoir pour agir selon qu’il le jugerait convenable.

La cérémonie se fit à l’église de Tremezso. La comtesse y assista voilée de noir des pieds à la tête. On ne rendit aucun honneur à l’assassin, mais la marquise reçut ceux auxquels elle avait droit. Armand conduisit le deuil. Jamais les contrastes de cette nature multiple ne s’étaient révélés d’une façon plus marquée que depuis ces quelques jours. Il y avait en cet homme l’étoffe de grandes choses : il ne fallait que les développer et les mettre en lumière. Le malheur l’aurait fait peut-être ; mais les passions furent plus fortes que lui. Il revint à Balbianino sans parler à personne