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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

porter les charges de la vie civile sans les laisser jouir de ses avantages.

Ces restrictions blessantes, cet antagonisme incompatible avec les règles de la justice distributive ne sauraient être le fait d’aucun pouvoir responsable et libéral ; les veuves et les filles majeures peuvent donc en toute confiance affirmer à nos magistrats municipaux leur droit et leur volonté de réclamer l’inscription sur les listes électorales, au moment où leur révision les ouvre chaque année à tout Français majeur, en possession de ses droits civils.

Un mauvais vouloir isolé et peu présumable, chez des fonctionnaires justiciables de leurs actes, donnerait lieu à un appel judiciaire, et permettrait ainsi à notre jurisprudence de sanctionner un droit dont aucun arbitraire ne peut détruire la légitimité.

Au point de vue de l’intérêt général, cette question est digne aussi de toute l’attention des législateurs, car il y a antagonisme et abaissement des mœurs partout où la femme, mineure pour le droit, est majeure pour le devoir public. Cette considération devient capitale devant un suffrage, prétendu universel, qui détruit toute pondération et toute stabilité civile et politique en préférant toujours le vote, c’est-à-dire la volonté des hommes, même incapables et immoraux, à celui des femmes pourvues de capacité et de moralité. Loin de produire la liberté, une telle institution, qui met trop souvent la raison à la remorque des intérêts et des passions, est grosse d’anarchie et de despotisme.

Nous regardons donc le suffrage comme un droit et un devoir de premier ordre qu’il ne nous est pas permis de sacrifier ; nous le revendiquerons par les moyens légaux qui nous sont acquis déjà, avec le ferme espoir d’être secondées par tous les hommes de progrès et d’avenir.