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AU BORD DES TERRASSES


Il rejoint le domaine où les fleurs avaient l’âge
Et l’éclat attendri de mon jeune printemps.
Si mon premier espoir naquit sous son feuillage,
Mon premier regret dort au fond de ses étangs ;

Si j’ai vu la nature et gardé son empreinte,
Comme un voile impalpable et de parfums tissé,
Qui fit mon esprit clair et mon âme sans crainte,
Et me donna le goût des choses du passé,

C’est aux vieux murs rejoints par des chaînes de lierre,
Aux bancs rivés au sol plus fort que des tombeaux,
Aux charmilles, gardant des voûtes de lumière
Dans l’entrelacement ancien de leurs rameaux,

Aux sources dont l’eau vive emplissait les fontaines
D’un flot presque invisible à force d’être pur,
Que j’ai dû mon regard vers les heures lointaines,
À travers les chagrins de ce monde peu sûr !