Page:Daudet - Contes du lundi, Lemerre, 1880.djvu/305

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

blante : « Dire que c’est moi, et que me voilà ! » et elle regarde en souriant une Diane qui se dresse dans la boiserie, — mince et rose, avec un croissant au front.

« Nesmond, viens donc voir tes armes ! » et tout le monde rit en regardant le blason des Nesmond qui s’étale sur une toile d’emballage, avec le nom de Majesté au-dessous.

« Ah ! ah ! ah !… Majesté !… Il y a donc encore des Majestés en France ? »

Et ce sont des gaietés sans fin, de petits rires à son de flûte, des doigts en l’air, des bouches qui minaudent…

Tout à coup quelqu’un crie :

« — Du champagne ! du champagne !

« — Mais non !…

« — Mais si !… si, c’est du champagne…

Allons, comtesse, vite un petit réveillon. »

C’est de l’eau de Seltz de M. Majesté qu’ils ont prise pour du champagne. On le trouve bien un peu éventé ; mais bah ! on le boit tout de même, et comme ces pauvres petites ombres n’ont pas la tête bien solide, peu à peu cette mousse d’eau de Seltz les anime, les excite, leur donne envie de danser. Des menuets s’organisent. Quatre fins violons que Nesmond a fait venir commencent un air de Rameau, tout en triolets, menu et mélancolique dans sa vivacité. Il faut voir toutes ces jolies vieilles