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LA DÉFENSE DE TARASCON



Dieu soit loué ! J’ai enfin des nouvelles de Tarascon. Depuis cinq mois, je ne vivais plus, j’étais d’une inquiétude !… Connaissant l’exaltation de cette bonne ville et l’humeur belliqueuse de ses habitants, je me disais : « Qui sait ce qu’a fait Tarascon ? S’est-il rué en masse sur les barbares ? S’est-il laissé bombarder comme Strasbourg, mourir de faim comme Paris, brûler vif comme Châteaudun ? ou bien, dans un accès de patriotisme farouche, s’est-il fait sauter comme Laon et son intrépide citadelle ?… » Rien de tout cela, mes amis. Tarascon n’a pas brûlé, Tarascon n’a pas sauté. Tarascon est toujours à la même place, paisiblement, assis au milieu des vignes, du bon soleil plein ses rues, du bon muscat plein ses caves, et le Rhône qui baigne cette aimable localité emporte à la mer, comme par