Page:Daudet - Fromont jeune et Risler aîné, 1874.djvu/235

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madame Dobson sans doute. Mais au second regard il se détrompa C’était une jeune femme qui lui ressemblait, élégante comme elle, Parisienne, la physionomie heureuse. Un homme, jeune aussi, vint la rejoindre, Ce devait être un voyage de noces, la mère les accompagnait, venait les mettre en wagon. Ils passèrent devant Frantz enveloppés dans le courant de bonheur qui les entraînait. Avec un sentiment de rage et d’envie, il les vit franchir la porte battante, appuyés l’un à l’autre, unis et serrés dans la foule.

Il lui sembla que ces gens-là l’avaient volé, que c’était sa place à lui et celle de Sidonie qu’ils allaient occuper dans le train… À présent, c’est la folie du départ, le dernier coup de cloche, la vapeur qui chauffe avec un bruit sourd où se mêlent le piétinement des retardataires, le fracas des portes et des lourds omnibus. Et Sidonie ne vient pas. Et Frantz attend toujours. À ce moment une main se pose sur son épaule.

Dieu !

Il se retourne. La grosse tête de M. Gardinois, encadrée d’une casquette à oreillons, est devant lui.

– Je ne me trompe pas, c’est monsieur Risler. Vous partez donc par l’express de Marseille ? Moi aussi, mais je ne vais pas loin.

Il explique à Frantz qu’il a manqué le train d’Orléans et qu’il va tâcher de rejoindre Savigny par la ligne de Lyon ; puis il parle de Risler aîné, de la fabrique.

– Il paraît que ça ne va pas, les affaires,