Page:Daudet - Jack, I.djvu/104

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sondeur, » comme il disait en clignant ses yeux de chat-tigre. Il se contenta donc de prier madame de Barancy de vouloir bien assister le dimanche suivant à une de leurs séances publiques et littéraires.

Sur le programme, cela s’appelait « séances de lecture expressive à haute voix, suivies de récitation de morceaux choisis de nos meilleurs poëtes et prosateurs. » Inutile d’ajouter que parmi ceux-là d’Argenton et Moronval figuraient toujours au premier rang. En somme, c’était une façon que les Ratés avaient trouvée de s’imposer à un public quelconque par l’intermédiaire de l’infatigable et expressive madame Moronval-Decostère. On invitait quelques amis, les correspondants des élèves. Dans le commencement, ces petites fêtes avaient lieu tous les huit jours ; mais depuis la déchéance de Mâdou elles s’étaient singulièrement espacées.

En effet, Moronval avait beau éteindre une bougie aux candélabres à chaque personne qui partait, ce qui assombrissait notablement la fin de la soirée, il avait beau mettre à sécher pendant la semaine, sur les fenêtres, le résidu de la théière en petits paquets collés, noirâtres, assez semblables à du varech hors de l’eau, et les faire resservir aux séances suivantes, les frais étaient encore trop considérables pour le dénuement de l’institution. On ne pouvait même pas compter sur la compensation d’une réclame, car le soir, à l’heure des séances, le passage des Douze-Maisons, avec sa