Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/151

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que troublent par intervalles la fumée et le vacarme d’un train à toute vitesse.

*

Ce matin-là, un matin de mai frais et splendide, le château présentait une animation extraordinaire. De la grêle était tombée dans la nuit au milieu d’un orage épouvantable, hachant les branches, dépouillant les arbres dont les verts débris pleins de sève, les feuilles et les fleurs trouées, déchiquetées, jonchaient le perron, mêlées aux éclats de vitre de la serre. Les jardiniers activaient leurs râteaux, leurs brouettes, dans un bruit de branchages traînants, de sable, de verre brisé.

Ganté, le chapeau sur la tête, Autheman, toujours un des premiers levés au château comme il était un des premiers arrivés à sa banque, arpentait la terrasse à pas fiévreux, absorbés, avec une agitation que l’on pouvait attribuer au saccage des belles charmilles et des magnifiques plants en caisses. À chaque tour de perron, arrêté par les marches, il revenait automatiquement, jetant parfois un regard vers les persiennes fermées de la chambre de sa femme, s’informant à quelque servante si madame n’était