Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/227

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se tamisait en ramages lumineux que les robes noires semblaient ramasser en marchant, pendant que l’Évangéliste parlait de mort, d’expiation céleste et que Lina par ses veines ouvertes et déchirées sentait s’échapper d’elle toute volonté, toute croyance au bonheur.

Cette fois Mme Autheman dépassa son promenoir habituel, traversa tout le parc aux taillis droits en quinconce, aux allées ratissées et soignées, élargies par la pompe du jardin français dont l’arbre curieusement élagué aligne des portiques, des péristyles avec les buis en boules, les ifs en vases montés, et s’efforce d’imiter le marbre en s’enroulant comme lui de lierre et d’acanthe. Jeanne se taisait, appuyée au bras de la néophyte tout émue de ce silence initiateur que troublait seul le frou-frou de leurs jupes ou le craquement des branchettes que la Lyonnaise émondait au passage dans son instinct de régularité.

Une grille les arrêta, dont Jeanne Autheman fit grincer les ferrures rouillées ; et l’aspect de la propriété changea, redevenue champêtre et libre, montrant des allées mangées d’herbes, des bouquets de bouleaux frémissant au coin de