Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/277

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d’ombre et de lumière, le même peut-être que sa mère regardait, tout près de là, de son fauteuil de convalescente ; et quelquefois, par cette commotion magnétique à distance, cet échange de pensée et d’humaine atmosphère si puissant entre ceux qui s’aiment, Éline avait comme un pressentiment de ce voisinage.

Un matin, Mme Autheman la trouva tout en larmes.

« Qu’y a-t-il encore ?… » demanda-t-elle durement.

« Ma mère est malade tout près d’ici…

– Qui vous l’a dit ?

– Je le sens. »

Dans la journée on apprit en effet la présence de Mme Ebsen à l’écluse. La présidente supposa une indiscrétion de domestique, personne n’étant moins crédule aux sentiments de commotion fine que ces croyantes orthodoxes. C’était fini de son influence, si la mère et la fille se rencontraient.

« Il faut partir, Ebsen… Êtes-vous prête ?

– Je suis prête… » dit la pauvre Ebsen, en tâchant d’affermir sa voix. Son petit trousseau d’ouvrière fut vite terminé, moins compliqué certes et moins soigné que celui pour lequel la