Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/320

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« Pourriez-vous me prêter celui-ci ? » demanda l’affolée du Sacré-Cœur, dévorée du désir de lire ces Entretiens pour en réfuter les hérésies.

« Oh ! prenez… emportez tout… »

Henriette l’embrassa avec transport, lui jeta en partant son adresse, rue de Sèvres, chez Magnabos, décorateur, des personnes très bien, un quartier de couvents… « Venez donc me voir… Ça vous distraira… »

Cette visite, avec tous les bons souvenirs qu’elle évoquait des anciennes discussions où Lina se montrait si bonne, si sensée, fut pour Mme Ebsen une épreuve douloureuse, comme certaines dates commémoratives autrefois fêtées ou pleurées à deux, la Juleaften sans arbre de Noël ni risengrœd cette année, l’anniversaire de la mort de grand’mère, le triste pèlerinage et le retour plus triste encore. N’était-ce pas en revenant l’an dernier du cimetière qu’Éline lui jurait « de l’aimer bien, de ne la quitter jamais » ? Et sous l’impression de ce souvenir elle écrivit à sa fille une lettre navrée, suppliante :

Au moins si je pouvais travailler, donner des leçons pour me distraire ; mais le chagrin m’a bien affaiblie, j’ai les yeux brûlés et j’entends difficilement